
discours de réception de jean cocteau à l’académie française en 1955.
« L’homme est un infirme, prisonnier de ses dimensions. Sa noblesse est d’avoir admis son infirmité et d’être parfois pareil à un paralytique rêvant qu’il court.Notre prison n’a que trois murs et c’est contre le quatrième mur que le prisonnier s’acharne, sur ce quatrième mur invisible qu’il écrit ses amours et ses rêves.Tout est prison dans cette affaire et l’artiste en est une lui même, incapable d’en sortir sauf par des œuvres qui prétendent échapper au bagne que nous sommes.C’est ce qui leur vaut une allure suspecte de bagnard qui s’évade, allure qui explique pourquoi la société lâche derrière elles sa police, ses sifflets et ses dogues.Tentatives de fuite, qui plus secrètes chez l’écrivain, deviennent frappantes lorsque la vie d’un peintre les illustre.Soit dans la malchance, soit dans la chance, un Van Gogh, un Picasso s’acharnent contre leur prison et contre eux mêmes, écrivent avec un clou et leur propre sang,tordent les barreaux du soupirail par lequel ils s’imaginent entrevoir une liberté factice qui n’est qu’un songe, puisque les murs qui les enferment se succèdent à l’infini. »